ECONOMIE
L'OCCASION NE FAIT PLUS LE LARRON
Le Journal de l'île (de la Réunion) du 25/10/02
Madagascar : les affairistes roulés dans le FAHAMARINANA
Hausse des taxes, lutte contre la corruption : depuis larrivée
au pouvoir
de Marc Ravalomanana, le marché de loccasion ne ferait
plus le larron à
Madagascar. Un coup dur pour les affairistes qui expédient
chaque année,
depuis la Réunion, des milliers de véhicules hors
dâge sur les routes
malgaches.
On dit que le nouveau président est un homme droit.
Cest bien pour le
peuple. Pas pour les affairistes. Des années durant,
Roger Pierre a vécu du
commerce entre la Réunion et Madagascar. Mais la situation
politique a
largement évolué du côté de Tananarive.
Après des mois de crise, qui ont
paralysé des pans entiers de léconomie malgache,
voilà que Marc
Ravalomanana, le nouvel homme fort du pays, a déclaré
la guerre à la
corruption. Un seul mot dordre : le fahamarinana. Traduisez
: la vérité. Un
coup dur pour tous ceux qui, dune manière ou dune
autre, ont longtemps
tiré profit de la légendaire souplesse
de ladministration malgache.
UN SECRET DE POLICHINELLE
En tant quagent transitaire, Roger Pierre en sait quelque
chose. En
lespace de quelques mois, sa clientèle a fondu comme
neige au soleil.
Cest devenu difficile de faire des affaires à
Madagascar. Du coup, de
moins en moins de personnes font appel à mes services.
Son boulot consiste
à régler, côté français, toutes
les formalités administratives (douanières
et portuaires) pour le compte des particuliers ou des sociétés
qui
souhaitent exporter des biens déquipement ou de consommation
vers la Grande
Ile. En fait, je travaillais surtout avec des Malgaches qui
venaient à la
Réunion acheter des voitures doccasion.
Avant la crise politique, on pouvait compter jusquà
200 véhicules qui, tous
les lundis matin, partaient par bateau pour Tamatave ou Majunga.
Aujourdhui, cest le bout du monde si on dépasse
la cinquantaine.
Le FAHAMARINANA aurait-il mis des bâtons dans les roues du
marché de
loccasion ? Une chose est sûre, la lutte contre la corruption
ne permet
plus à cette filière dêtre aussi rentable.
Il faut savoir que les taxes
sur les véhicules importés sont particulièrement
élevées à Madagascar,
explique Gilles Langlois, directeur de Réunion Transit, une
société
spécialisée dans le transport international. On peut
donc supposer quil y a
sur place quelques tentatives de corruption. Une supposition
prudente qui
masque mal un secret de polichinelle. Car pour faire baisser les
taxes, le
moyen le plus efficace a toujours été de graisser
la patte aux agents des
douanes.
La combine la plus répandue consiste à vieillir
dau moins cinq ans les
véhicules doccasion dans la mesure où le montant
de la taxe prélevée par
ladministration malgache dépend de leur valeur à
largus. Pour cela, il
suffit de modifier la date de première mise en circulation
sur une
photocopie de la carte grise. Un petit coup de Blanco,
avec la complicité
rémunérée dun douanier, et le tour est
joué.
LES POUBELLES POUR ALLER DANSER
Effet dannonce ou vraie volonté politique ? Toujours
est-il
quofficiellement, le nouveau pouvoir malgache ne veut plus
entendre parler
de toutes ces combines. Apparemment, les douaniers sont devenus
moins
complaisants, note Roger Pierre. Et daprès ce que je
sais, ça nest pas
très bon pour les affaires. Pour vous donner un exemple,
une voiture
doccasion achetée 3 000 F à la Réunion
devra être revendue au moins 15 000
F à Madagascar pour commencer à être rentable.
Lennui, cest que 15 000 F,
cest déjà trop cher pour le marché local.
Dans le même temps, les taxes
nont cessé daugmenter pour atteindre 116 % pour
les véhicules de tourisme
et 75 % pour les utilitaires.
Pas évident, dans ces conditions, de dégager des
bénéfices. Chez Trans
Express Réunion (TER), un autre agent transitaire, on confirme
une baisse
très nette de la clientèle : On avait surtout
des particuliers ou des
petits commerces organisés, comme des sociétés
de taxis, qui venaient
régulièrement acheter des véhicules à
la Réunion. Je ne suis pas inquiet
pour lavenir mais jai limpression que les effets
de la crise politique
vont encore se faire sentir pendant au moins six mois, estime
Riaz Mall, le
directeur de TER.
Quoi quil en soit, le parc automobile malgache est loin,
très loin dêtre
saturé, et de laveu de tous, ce nest certainement
pas un changement de
pouvoir qui coulera le marché de loccasion.
La lutte contre la corruption, provisoire ou non, ne devrait donc
pas être
un écueil pour les épaves de la Réunion. Autrement
dit, nos bonnes vieilles
guimbardes seront toujours les poubelles pour aller
danser sur les routes
malgaches...
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DES MILLIERS DE VÉHICULES IMPORTÉS D'EUROPE
Directeur commercial chez GMC, une agence spécialisée
dans le transport
maritime, Gérald Grosset le reconnaît volontiers :
le marché de loccasion à
Madagascar est susceptible de générer de gros bénéfices.
Pas étonnant, dans
ces conditions, si les véhicules importés viennent
de plus en plus loin.
Lan dernier, nous avons chargé 4 639 véhicules
au départ du Havre, qui ont
ensuite, via la Réunion, été livrés
dans six ports malgaches.
Des milliers de véhicules doccasion qui, faut-il le
souligner, nont pas
toujours fière allure : Daprès ce quon
voit passer, ce sont surtout des
voitures de deuxième ou troisième main. Il y a parfois
de véritables
poubelles, qui nauraient sans doute pas pu obtenir le contrôle
technique en
France. Si Renault et Peugeot restent les deux marques les
plus
plébiscitées, tous les véhicules ne proviennent
pas du marché français.
Environ 10 % sont achetés en Belgique par des intermédiaires
malgaches ou
par des sociétés françaises comme Autotrans,
précise Gérald Grosset. Quant
au transporteur, il est norvégien : A la Réunion,
notre agence représente
la compagnie Hual. Celle-ci dispose dénormes rouliers,
denviron 200 mètres
de long, qui peuvent contenir jusquà 6 100 véhicules.
Prochaine escale au
Port dun de ces monstres de la mer : le 11 novembre. De quoi
alimenter en
4L, 404, 504 et autres 405 le parc automobile malgache
Bertrand Duchet
Le Journal de l'île
LA CRISE AU QUOTIDIEN (Source AMADEA)
Voici quelques repères pour avoir une idée de la
flambée des prix sur les Produits de Première Nécessité.
Le SUCRE : 4000fmg le kilo avant la crise , aujourd'hui
de 9000fmg à 12000fmg
Le HUILE : 5000fmg à 6000fmg avant la crise à
9000fmg à 12000fmg.
Le GROS SEL : 1000fmg à 1200fmg le kilo avant la crise
: 10000fmg à 12000fmg aujourd'hui.
Le CHARBON DE BOIS : 15000 à 20000fmg avant la crise,
35000 à 50000fmg aujourd'hui.
L'ESSENCE : 4700fmg avant la crise à 28000 à
35000fmg.
GAS OIL : 2700fmg avant la crise à 20000 à
25000fmg actuellement.
Quant au riz, après une psychose de pénurie
qui a fait bondir le prix jusqu'à 7000fmg, il se stabilise
autour de 3000-3500fmg le kilo, au lieu de 2500fmg avant la crise.
Ce prix " raisonnable " doit être le fait de l'actuelle
période de la récolte du riz sur les Hauts-Plateaux.
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